Toujours le même principe : à partir de la première phrase d'un roman, écrire une nouvelle.
« Condamné à mort ! Voilà cinq semaines que j’habite avec cette pensée, toujours seul avec elle, toujours glacé de sa présence, toujours courbé sous son poids ! ». Victor Hugo, Le dernier jour d’un condamné.
Condamné à mort ! Voilà cinq semaines que j’habite avec cette pensée, toujours seul avec elle, toujours glacé de sa présence, toujours courbé sous son poids ! Je tourne en rond dans ma cellule, la guillotine est là, fière, arrogante ; je m’arrête, ferme les yeux puis les rouvre, elle est toujours là. Elle me suit, m’épie, sonde mon cœur, écoute ma raison et ne me lâche plus. Elle est ici, là, là-bas et encore là. Elle est partout à la fois. Elle a l’ubiquité de l’air qui rentre dans ma cellule, de la lumière qui s’introduit avec pudeur pour éclairer un peu les murs humides, gris et sales, les murs qui m’enferment, les murs entaillés par les ongles des captifs qui sont passés par ici.
J’étais un homme. Je ne suis plus qu’une âme triste, vide, creuse, dépouillée de tout ce qui m’a appartenu. Je ne suis plus rien. Pas même un nom sur une liste. Je ne suis qu’un matricule. Un numéro qu’on rayera dans quelques jours d’un trait de crayon. Un numéro qu’on oubliera bien vite, un corps qu’on jettera à la fosse commune dans l’anonymat des ossements déjà présents. Je ne serai alors plus qu’un cadavre pourrissant à cinq pieds de profondeur avec un peu de terre fraîchement retournée pour seul souvenir d’une vie d’homme qu’on a ôté.