Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Par une soirée extrêmement chaude du début de juillet...

crime-chatiment.jpg Toujours le même principe : à partir de la première phrase d'un roman, écrire une nouvelle.

« Par une soirée extrêmement chaude du début de juillet, un jeune homme sortit de la toute petite chambre qu’il louait dans la ruelle S… et se dirigea d’un pas indécis et lent vers le pont K ». Fédor Dostoïevski, Crime et châtiment

Par une soirée extrêmement chaude du début de juillet, un jeune homme sortit de la toute petite chambre qu’il louait dans la ruelle S… et se dirigea d’un pas indécis et lent vers le pont K. Par bonheur, il ne croisa pas sa voisine de palier, Irina, qui était sortie quelques minutes  avant lui. Il ne revit pas sa frêle silhouette, ses avant bras laiteux et ses doux cheveux blonds. Il ne croisa pas son regard, bleu comme un reflet du ciel sur la banquise. Il n’eut pas à sonder son cœur, à parler à ses yeux pour lui arracher les mots que ses lèvres ne consentaient à lui susurrer.
Elle l’aimait toujours et il l’aurait lu dans l’azur de ses yeux. Elle l’aimait et elle avait rompu. Elle avait rompu après une folle semaine où leurs cœurs s’étaient élancés, tels des chevaux prenant le mors aux dents, fougueusement, passionnément, dans une merveilleuse histoire d’amour.
Il était à présent arrivé sur le pont K. Le jour avait fini de décliner et de vieux lampadaires en fonte aspergeaient une lumière timide, blafarde, spectrale et fantomatique, découpant la silhouette du jeune homme grossièrement en une forme indécise et tremblante comme une flamme dans le vent. Le bruit de la ville parvenait faiblement à ses oreilles, et il ne vit pas une jeune femme s’approchait de lui, comme si tout son être n’était plus que ce corps se penchant au-dessus du parapet.
Se pencher un peu plus.
Un point au bout d’une ligne. Fermer ses yeux pour ne plus voir. Une lumière qu’on éteint le soir quand les volets sont tirés ; et l’obscurité qui gorge tout l’espace. Il voulait tout cela à la fois. Ou plutôt, il ne voulait plus rien, pas même continuer à vivre.
Il enjamba le parapet. L’air était doux. Les reflets des lumières ondoyaient devant lui. Les flots étaient maintenant sous ses pieds et il était prêt à se faire engloutir par le trouble de l’eau.
L’inconnue n’hésita plus, elle accéléra le pas, fonça sur lui et lui saisit le poignet, l’obligeant à revenir de l’autre côté. Du côté des vivants. Il croisa son regard, magnifié. Elle avait un beau sourire.

Les commentaires sont fermés.